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Lundi 19 juillet 2021

Dossier (1/3) : Le Banlay futur dans un grand (ur)bain de verdure

Au printemps, les écoliers de georges-Guynemer se sont initiés à la piézométrie avec Orianne Heymann, hydrogéologue du bureau d’études CPGF Horizon.
Plus grand quartier HLM de la Nièvre, le Banlay va devenir plus vert, plus vivable, plus vivant, grâce à un vaste Programme de renouvellement urbain mené jusqu'en 2026.

Ils partent à la recherche du forage avec l’exubérance de mini-Indiana Jones urbains. Ce matin transi de fin mars est resté à l’heure d’hiver mais les CM1 de l’école Georges-Guynemer n’en ont cure. Canalisés par leur institutrice Emilie Dumont, ils sautillent entre les immeubles du Banlay jusqu’à un carré de friche au bout de la rue Gustave-Flaubert. Au milieu de l’herbe haute, un tube discret de métal rouge dépasse du sol. Hydrogéologue du bureau d’études CPGF Horizon, Orianne Heymann déverrouille le couvercle, invite à sentir l’air qui sort du forage : « Ah, ça pue. » A l’aide d’une sonde, les écoliers mesurent la profondeur de la nappe phréatique, puis son épaisseur. Font, sans le savoir, de la piézométrie. L’exercice, qui colle idéalement à leur projet pédagogique de découverte du quartier et au travail du moment sur la mesure des longueurs, recèle un autre but pour les « grands » : déterminer les emplacements les plus propices à l’expansion de l’agriculture urbaine.

Faire (re)fleurir la ruralité dans les dix prochaines années relève de la science-fiction quand on circule au printemps 2021 dans les rues bitumées et l’horizon bétonné du quartier, mais l’ambition est plus que sérieuse. En décembre 2020, elle a fait du programme « Banlay fertile » l’un des 27 lauréats de l’appel à projets Quartiers fertiles lancés par l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU).

Avant de voir pousser une forêt de HLM, dans les années 60, le Banlay fleurait la campagne, exhalait une quiétude semi-rurale dont se souviennent encore les plus anciens Neversois. Le Programme de renouvellement urbain ne prétend pas revenir à cet âge perdu mais, de labellisation EcoQuartier en projet Banlay fertile, la nature retrouvera son droit de cité pour faire du quartier une terre – et une destination – d’épanouissement. Essor de la biodiversité et de la production locale, développement de la filière de maraîchage biologique déjà bien ancrée à Nevers (à la Baratte notamment) et dans l’agglomération, création de parcs cueillette, de poulailler collectif, de jardins en partage, etc. C’est un véritable éden que les habitants du quartier verront naître sous leurs fenêtres au fur et à mesure que le PRU remodèlera le Banlay.

Faire du Banlay et, plus largement, de Nevers une « ville durable »

La plupart des bâtiments déconstruits laisseront place à des espaces naturels qui, le long de l’ex-RN7 reconvertie en paisible boulevard urbain, prendront l’ampleur et le charme d’un Central Park neversois semé de pépinières, vergers et champêtres aires de jeux. Cette poussée de sève campagnarde dans le plus grand quartier HLM de la Nièvre n’a rien d’une utopie, encore moins d’un caprice. Elle est au cœur, depuis l’origine, de la démarche de renouvellement urbain portée par la Ville de Nevers. Elle exauce un rêve de vert exprimé par les habitants tout au long des réunions préparatoires. Elle s’inscrit, enfin, dans un contexte sociétal d’inquiétude climatique. Faire du Banlay et, plus largement, de Nevers une « ville durable » explose le carcan convenu de l’effet de mode pour s’imposer comme une évidence, une nécessité que les confinements dictés par la crise sanitaire attisent.

Pour en polir toutes les facettes, la municipalité a fait le choix de s’appuyer sur une labellisation EcoQuartier, issue en 2012 du Grenelle de l’environnement. En février 2020, Denis Thuriot, maire de Nevers, a signé l’adhésion à la Charte EcoQuartier, qui se décline en vingt engagements, dont les plus emblématiques sont la mise en œuvre des « conditions du vivre-ensemble et de la solidarité », d’une « qualité urbaine, paysagère et architecturale », « un développement économique local, équilibré et solidaire », « un urbanisme permettant d’anticiper et de s’adapter aux risques et aux changements climatiques », etc.

Parallèlement à ce « chantier » EcoQuartier, un état des lieux de la biodiversité est en cours. Jusqu’en novembre, le bureau d’études DCI Environnement est chargé d’identifier toutes les espèces animales et végétales vivant dans le Banlay, répertorier les éventuelles espèces protégées. Il lui est également demandé d’accompagner la Ville pour l’intégration de cette biodiversité dans les futurs aménagements du quartier. Comme pour la piézométrie, ce travail sera assorti d’une dimension pédagogique grâce à des animations menées avec les écoles et le Centre social. Pour celui-ci, être en première ligne du PRU s’est imposé comme un des axes de son projet d’établissement 2019-2023. « Agir collectivement pour faire société dans un contexte de transformation du quartier », énonce le directeur Alexandre Lavaur. Dans l’escalier qui mène à son bureau, une fresque réalisée pendant les vacances de Noël met en images d’adolescents les mots du PRU, leur donne chair, sens et couleur.

Un attachement très fort à ce quartier

A l’arrière du Centre social, installé à une extrémité du long bâtiment abritant également l’école Georges-Guynemer, un potager et des plantations de fleurs commencent à prendre forme entre les mains d’une dizaine d’habitants qui apportent ainsi leur patte au concept Banlay fertile. Travail sur la mémoire du quartier, action commune avec les journalistes en herbe du collège Adam-Billaut : les initiatives affleurent sur le terreau de ce « repère » historique du Banlay, où se croisent et cohabitent toutes les générations (225 adhérents dont une centaine de jeunes).

Et ce n’est pas fini : « Le PRU va être une source d’inspiration pour les dix prochaines années », sourit Alexandre Lavaur. Appelé à disparaître, le bâtiment actuel sera remplacé par un « lieu de vie » à l’élaboration duquel les usagers seront naturellement associés. Au carrefour des débats, le Centre social mesure l’affection des habitants pour ce quartier mal-aimé : « Beaucoup de gens parlent en mal du quartier, et pourtant, pour ceux qui doivent partir, c’est un crève-cœur. Les incivilités existent partout, même à la campagne, mais elles prennent plus d’ampleur dès qu’on parle du Banlay. On se rend compte qu’il y a un attachement très fort à ce quartier, qui fonctionne comme une petite ville. Avec les écoles, les commerces, les services publics, on peut presque tout faire sans sortir d’ici. »